Je posais le dernier des cartons
sur la moquette bleue de ma nouvelle chambre. Ma sœur Victoire de onze ans y déboula presque aussitôt, râlant comme à
son habitude :
-
- Non, mais tu vois, je n’ai rien contre ma
nouvelle chambre, mais je constate juste que c’est encore la pièce la plus
petite de la maison !
-
- Les toilettes sont plus petites…
- -
Non, mais qu’et-ce que tu peux être con !
On peut jamais parler avec toi ! Et pourquoi t’as la pièce la plus grande,
hein ?
- -
Parce-que, je suis le plus grand, le plus intelligent
et le plus beau, et maintenant, sans t’en offenser, princesse, j’aimerais que
tu te tires de ma chambre !
- -
Non, d’abord papa est le plus âgé et il fait
deux centimètres de plus que toi, il a fait de brillantes études scientifiques,
ce dont tu ne seras jamais capable avec ton minable bac ES et il est mille fois
plus beau que toi ! Sinon ça ferait longtemps que tu te serais trouvé une
copine ! Na ! Bien fait pour ta gueule !
-
- Tire-toi !
- -
Oh, mais tu prends facilement la mouche,
toi ! Bon si tu passais moins de temps dans les mangas et autres animes tu
pourrais être beaucoup plus intelligent et attrayant ! Papa dit que ce
genre de choses ça fait des idiots !
- -
Dégage !
Je la voyais reprendre sa
respiration. Avant qu’elle ne puisse dire un mot je la poussais dehors à coups
de chaussures. Je refermais la porte et me laissait glisser le long de
celle-ci. Ma mère allait probablement débouler comme à son habitude. Mais de
toutes les villes de France, pourquoi avait-elle dû être transférée à
Versailles ? D’accord, c’est proche de Paris mais une ville de bourgeois,
c’était une ville de bourgeois catholiques anti-mangas ! Du moins c’est ce
que je croyais. Qui allait prévoir que tous mes préjugés allaient être détruits
par leurs existences mêmes ? C’est le journal de ma vie de terminale ES
dans un « super lycée », comme le disait ma mère. Je ne pense pas
présenter mes parents, ils se présenteront eux-mêmes au fil de mon année.
Je pense que ma sœur est déjà assez présentée et que son caractère de
petite peste a été assez mis en avant ! Plus j’y réfléchissais moins je
voyais un moyen efficace pour me sortir d’un ennui évident. Je m’écriai, alors,
dans un immense désespoir :
-
- Que faire !
-
- Commence par finir ce que tu as commencé, me
hurla ma mère depuis la cuisine.
- -
J’ai rien commencé je te signale !
- -
Vide tes cartons ! Et plus vite que
ça ! Je veux que ta chambre soit nickel pour la rentrée ! Et elle a
lieu demain !
- -
Et rappelle-moi pourquoi on s’y est pris aussi
tard pour le déménagement ?
-
- Tu vas me parler sur un autre ton, jeune homme,
hurla-t-elle hors d’elle en ouvrant brusquement la porte de ma chambre.
Voir ma mère dans un tel état
était quelque chose d’effrayant. Je me rattrapais :
-
- Mais c’est vrai que d’emménager la veille de la
rentrée, ce n’est pas la mer à boire ! Je vais ranger ma chambre.
Elle claqua la porte de ma
chambre sans ajouter un mot. Me laissant seul avec mes démons. Il commençait à
pleuvoir. La vie ici allait s’avérer très… excitante ?!
Lucas.